Je suis Rody Lamoree. J’ai 25 ans. Dans notre monde, les fantômes, esprits et autres entités sont présents. En temps normal, ils ne peuvent pas interagir avec les vivants, mais parfois la brèche entre les dimensions s’ouvre et les morts peuvent influencer les vivants. Suicide mystérieux, maisons hantées, meurtres inexplicables. Cela fait partie de notre quotidien.
Vincent, Marieanne et moi sommes amis depuis l’enfance. Nos enfances n’ont pas été de tout repos. Les parents de Vince, Gabriel et Victoire Charbonneau, sont morts dans un incendie et il a été placé dans une famille d’accueil. Il a perdu son sens du goût depuis l’incendie. Enfin, c’est ce qu’il dit, mais je pense qu’il l’a perdu bien avant. Manon a eu son œil droit remplacé par un œil de poupée à cause d’un esprit du chaos portant le nom de Marverick. Depuis, elle doit le cacher. Elle me dit qu’elle peut voir les « traces » des morts avec cet œil. Leurs empreintes. Quant à moi, l’esprit dérangé de Gabriel Charbonneau a causé ma main et mon bras droit à devenir noir comme du charbon. Il me prenait pour son fils et il a tenté de me tuer. Heureusement, l’esprit de sa femme Victoire m’a sauvé mais elle me hante depuis ce jour. Elle me prend, elle aussi, pour Vincent. Je dois toujours dissimuler mon bras maudit avec des manches longues et un gant. En plus, ce bras me lie directement avec la dimension des morts. Bref, je n’ai pas eu une enfance ordinaire!
Je travaille maintenant comme serveur à La Gueule de Saturne, le bistro dont Vince est le propriétaire. Manon, elle, est designeure de mode. Son rêve d’enfance était d’ouvrir une pâtisserie, mais elle a changé de carrière. Moi, j’ai lâché l’école tôt. Non parce que je n’étais pas intelligent, mais avec mon bras maudit, j’étais plus occupé à sauver des vies contre des esprits maléfiques qu’à étudier!
J’étais en train de servir un client quand Victoire commence à me déranger.
« Vincent, chéri? Es-tu là? » Dit-elle de sa voix spectrale.
Je tente de l’ignorer, comme d’habitude, mais elle sait se faire insistante. Elle apparait devant moi, avec son visage brûler.
« Tu n’as pas à servir ces bons à rien! Tu es un Charbonneau! Et je suis désolée. Tellement désolée! »
« Ce n’est pas le moment. » Murmurai-je, voulant la faire taire.
« Pardon? » Me demande le client.
« Rien du tout, Monsieur! Savourez votre repas. »
Je me dépêche de me cacher dans la cuisine.
« Un problème? » Me demande Vince.
« Ta mère. » Lui dis-je et mon patron soupire.
« Je suis DÉSOLÉE! » Continue-t-elle d’une voix tourmentée.
« Lamoree, dans mon bureau. »
« Oui, Chef! »
Je vais au bureau de Vincent avec lui. Une fois que la porte est fermée derrière nous, mon patron me parle à nouveau.
« S’excuse-t-elle encore? »
« Oui. Merde, cela dure depuis 16 ans! »
« Je sais. »
« Je lui ai dit à maintes reprises que je ne suis pas toi, elle ne veut rien entendre! En plus, je ne sais même pas si elle dit vrai. »
« Oh, elle ne t’a pas menti. Rody, c’est sa faute si je ne peux plus rien gouter. C’est elle qui a mis un truc de brûlant et métallique dans ma bouche en guise de punition. Elle était folle, ma mère, et mon vieux n’était pas mieux! »
« Je sais. Il te battait souvent. Hé, Vincent. »
« Quoi? »
« Je sais que je te tapais sur les nerfs avec ça quand nous étions gamins et adolescents mais… l’incendie, c’était vraiment un accident, n'est-ce pas? »
« Franchement, Rody! Crois-tu vraiment que j’aurais cramé mes propres parents? »
« Au début, non, mais… ton père… il avait tellement de haine dans son âme… quand il m’a attaqué… en me prenant pour toi… alors, je me disais que… Oui, que tu les aurais tués indirectement. »
« Rody… »
« Je sais que cela n’a pas d’importance. C’est du passé, mais… je suis jaloux. »
« Jaloux? »
« De toi. Manon et son œil de poupée. Moi et mon bras noir. Nous sommes liés au supernaturel de notre monde alors que toi... Toi, tu as la vie facile. Tu as ton bistro, plein d’argent, et nous… »
« NE DIS PAS DE CONNERIES! » Hurle soudain Vincent. « Ma vie n’est pas facile! Toi, moi, Manon… nous avons fait un Contrat! »
Il me montre l’anneau aux runes sur son annulaire droit. Anneau couleur or blanc. Je regarde mon gant couvrant ma main noire. Main ayant également un anneau aux runes sur son annulaire.
« Tu t’en souviens, j’espère? » Me demande mon patron d’un ton pincé.
« Pardonne-moi, Vincent! » Continue de dire Victoire, qui m’avait suivi dans le bureau de son fils.
« Bien sûr. » Dis-je, ignorant Victoire. « C’était ton idée. Nous l’avons fait l’après l’école, dans la cour de récrée. C’était après que mon bras était devenu noir et que Manon a eu son nouvel œil. »
« Exact. »
« Hé, on devrait appeler Manon. »
« Pourquoi? »
« Parce qu’elle à une meilleure mémoire que moi pour les détails. »
« Tu dis juste ça pour lui parler! » Je prends le combiné de son téléphone. « Hé, Rody? » Je compose le numéro de Manon. « NON! »
« Marieanne Vacher. Bonjour. »
« Trop tard! » Dis-je à mon patron. « Salut, c’est moi. » Dis-je à mon amie.
« Rody! Tout va bien? »
« Oui, aucune mauvaise nouvelle à l’horizon. J’aimerais savoir… te souviens-tu du Contact? »
« Le Contact de Liens Éternels? Bien sûr que je m’en souviens. Nous portons tous un anneau nous unissant dû à une puissante magie surnaturelle. Le briser reviendrait à mourir. »
« Oui, je t’appellais pour… HÉ! »
Vince a pris le combiné de mes mains.
« Salut, Manon. Pardonne Rody, mais il doit retourner travailler. »
« Oh, Vince! Cela fait longtemps que l’on ne sait parler. On devrait se voir, tous les trois. »
« C’est une bonne idée. Nous en reparlerons plus tard, d’accord? »
« D’accord. Au revoir. »
« Au revoir. »
Vincent raccroche. Il me lance un regard noir.
« Vince! Allons, ne te mets pas en colère pour ça! Parler à Manon, c’est rien! »
« Retourne travailler. »
« Mais… »
« TOUT DE SUITE! »
Je sors de son bureau en courant et le fantôme de Victoire me suit toujours.